CHAMPOLLION


JEAN-FRANÇOIS  CHAMPOLLION

          DÉCHIFFREUR DES HIÉROGLYPHES

            par Guy  Chassagnard

2018 CHAMPOLLION


Paru en 2001, réédité en 2018

420 pages - Aux  Éditions   Segnat

Diffusion : Amazon.fr

Prix TTC :     18,50  €

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L’OUVRAGE

Sans Jacques-Joseph, érudit autodidacte,

Il n’y aurait pas eu Jean-François, égyptologue,

Et sans Jean-François, 

Qui aurait déchiffré les hiéroglyphes ?


Jacques-Joseph. - Né le 5 octobre 1778, à Figeac-en-Quercy, d’un père dauphinois, colporteur de livres et d’images pieuses, venu du Dauphiné s’installer en province du Quercy.

Devenu professeur, archéologue, conservateur de la Bibliothèque nationale, mentor et éditeur de son jeune frère.


Jean-François. - Né le 23 décembre 1790, à Figeac-en-Quercy ; le dernier de sept enfants.

Passionné des langues anciennes et orientales, il fut capable, parlant le copte, comprenant le démotique, de déchiffrer les hiéroglyphes égyptiens dont l’empereur Théodose Ier avait interdit l’usage au IVe siècle. 


L'ouvrage ne répond qu'à une seule condition : raconter la vie, parfois pittoresque, parfois tourmentée, de deux frères, issus du Quercy.

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LES PREMIÈRES PAGES

Avant-propos

De nombreux ouvrages ont été, dans le passé, consacrés à la vie et à l’œuvre des frères Champollion, Jacques-Joseph et Jean-François, et plus particulièrement à celles du cadet – immortalisé par son « déchiffrement » des hiéro­gly­phes de l’É­gypte ancienne. Citons, entre autres, la magistrale biographie de l’érudite Fräulein Her­mine Har­t- leben, publiée en allemand d’abord, en 1906 et en français ensuite, en 1983, l’intéressante enquête du journaliste Jean Lacouture, parue en 1988, le captivant « roman » d’une découverte de Madeleine Pourpoint, datant de 1953, sans oublier la très sérieuse et très documentée thèse consacrée à « l’autre Champolliono» par Charles-Olivier Carbonell en 1984.

Tout semblerait donc, de prime abord, avoir été dit, le plus souvent par des esprits fort éclairés, à propos des frères Champollion et de leurs recherches centrées sur la compréhension de la civilisation, du langage et de l’écriture de l’Égypte antique. Le voudrions-nous que, nous en som­mes bien convaincu, nous ne saurions, en la ma­tière, rien apporter de très nouveau. 

L’ouvrage que nous présentons aujourd’hui au lecteur n’a donc pas pour vaine prétention de mieux faire con­naî­tre les recherches linguistiques et égyptologiques de Jean-François et de Jacques-Joseph Champollion, dont la renommée est depuis longtemps universelle mais, plus modestement, plus sim­plement, de ramener ceux-ci vers leur ville natale, Figeac – qu’ils quittèrent, au demeurant, l’un et l’autre, fort jeunes – et de s’attarder aux différents séjours qu’ils y ont faits. 

Ce qui ne nous empêchera pas pour autant de suivre leur cheminement personnel vers d’autres lieux, à savoir Grenoble, Paris, Turin ou Alexandrie.

Nous espérons qu’en rassemblant sous une même couverture tout ce qui a été dit et écrit de façon fort éparse sur les deux frères, à notre avis inséparables dans l’étude comme dans le mérite, nous aurons, malgré tout, fait œuvre utile. 

Qu’il nous soit, en conséquence, donné acte d’une bonne intention pas totalement futile dans son application. D’autant, il est vrai, que nous avons grand plaisir à rapporter ici certains écrits de Jacques-Joseph et de Jean-François Champollion, demeurés à ce jour iné­dits – ou ayant fait l’objet de transcriptions quel­que peu sommaires. 

Si ceux-ci n’apportent rien de nouveau ou de plus à l’égyp­­tologie, ils permettent, néanmoins, de mieux cerner l’enfance, l’adolescence et, d’une façon générale, la vie de nos deux héros. 

Nous pensons, entre autres écrits, à ce cahier tou­jours inédit des « Vingt premières années de ma vie » de Jacques Joseph dont il sera ici, dès l’abord, longuement question.

L'auteur.


Jacques Champollion

Jacques Champollion (1744-1821) était originaire du hameau de La Roche, situé dans la paroisse de Valbonnais, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Gre­noble. On ignore encore quel­le fut la profession de son père. Ce dont on est sûr, cependant, c’est que son grand-père Claude, agriculteur l’été, s’adonnait, quant à lui, au colportage pendant les mois d’hiver. 

Si l’on en croit, d’ailleurs, un membre de la famille, Léon de la Brièr1, les Champollion étaient tous, à l’origine, issus de Champoléon, sur les coteaux du Drac, en­tre les villes de Gap et de Grenoble, « où ils habitaient un château dont les ruines subsistent ». 

« L’un d’eux épousa, en 1580, une Béranger du Guâ. Un autre était, en 1663, gouverneur d’Embrun. Un Gaspard-Adrian Bonnet du Couvat de Champollion fut commandant de compagnie au régiment de Foix-Infanterie. Enfin, un mar­quis de Champollion figurait, en 1786, parmi les gentilshommes chargés du service auprès du duc d’Orléans, gouverneur du Dauphiné. » 

« A une date indéterminée et pour des cau­ses également indéterminées, mais certainement politiques », un de ces Champollion, déjà bibliophile, linguiste et érudit, « fut expulsé du département (sic) et vit ses biens confisqués, sans doute vers 1765 ou 1770. Il fallait vivre ».

« Il se consacra donc, pour ce faire, à ce à quoi il était apte, la librairie ambulante. 

« Les hasards de ce commerce l’amenèrent dans le Lot ; il s’y fixa, s’y maria ; ses fils y naquirent… »

Expulsé ou non de son Dauphiné natal, Jacques se fit, très tôt, colporteur de livres, d’imagerie populaire et d’objets religieux, parcourant tout le midi de la France, de villes en bourgades, de marchés en fermes. Une visite à Figeac, petite cité du Quercy renommée pour ses activités commerciales diverses, lui fit rencontrer « une jeune fille pieuse et douce » du nom de Françoise (ou Jeanne-Françoise) Gualieu – née à Figeac en 1744.

Ladite jeune fille était de modeste mais de bonne famille. Les Gualieu, parfois sim­­ples artisans, parfois no­ta­­bles communaux, occupaient un rang des plus con­vena­bles au sein de la bourgeoisie locale. Le grand-père de Françoise avait longtemps exercé le métier de tisserand, fabriquant des toiles de chanvre et de lin.

Le mariage entre les deux jeunes gens (!), approchant alors de la trentaine, fut célébré à Figeac, en l’église Notre-Dame du Puy, le 28 janvier 1773. L’é­pousée apportait en dot, à son mari, une som­me de 400 livres ; ce qui devait permettre au nouveau couple de s’installer confortablement. 

A remarquer que le contrat de mariage indiquait que Françoise Gualieu n’avait pu signer « pour ne savoir de ce requiseo». La jeune femme ne savait, en vérité, ni lire ni écrire. Lors de la rédaction de son testament, trente ans plus tard, elle devait faire usage d’un subterfuge, et le notaire requis inscrivit alors, sur ses instructions : « Dame Gualieu, testatrice… a déclaré ne pouvoir signer à cause du tremblement de ses mains… ».

Quelques mois plus tôt, en juillet 1772, peut-être dans l’attente de son mariage, Jacques Champollion avait acquis à un certain Joseph de Bonnet, conseiller du roi et ancien receveur des tailles de Figeac, une maison à colombage située non loin de la place haute (ou place du seigle), dans la som­bre et étroite volte de la Boudousquerie (rue de la cire brute). Ceci pour la somme de 950 livres dont 600 payées comptant. 

Cette maison avait la particularité, toute figeacoise, de posséder une grande salle en rez-de-chaussée, à vocation artisanale ou commerciale, surmontée de deux étages dédiés à l’habitation, ainsi que d’un vaste soleilho (grenier ouvert) sous le toit de tuiles rondes. L’ancien propriétaire avait toutefois tenu à conserver pour son usage personnel l’écurie voisine, avec « réserve à perpétuité » de la porte y donnant accès.

C’est en ce lieu que devaient naître successivement les sept enfants Champollion : Guillaume (1773), Thérèse (1774-1850), Pétronille (1776-1847), Jacques-Joseph (1778­-1867), Jean-Baptiste (1780-1782), Marie-Jeanne (1782-1833), enfin Jean-François (1790-1832). 

En décembre de l’année 1779, Jacques Champollion se ren­­dit encore propriétaire d’une boutique, possédant arrière-boutique et chambre annexe, sur la place basse (ou place du froment), près de la halle aux légumes ; moyennant le prix de 1 600 livres, « laquelle somme a tout présentement été réellement comp­tée en bonnes espèces de cours ». 

Selon Jules Malrieu, qui fut à Figeac, au début du XXe siècle, président du tribunal d’instance et adjoint au maire, «la municipalité lui aurait accordé une subvention pour le déterminer à ouvrir la première boutique de librairie qu’ait eue notre ville4 ».

C’est là qu’il devait exercer pendant une quarantaine d’années, avec des fortunes diverses, son nouveau métier de libraire sédentaire. Était-il resté colporteur depuis son arrivée à Figeac, nulle archive ne peut en témoigner aujourd’hui. 

La « Librairie Champollion », implantée en plein cen­tre de la ville, se trouvait à l’opposé du commerce actuel portant le même nom… Là où les figeacois purent, par la suite, fréquenter une mercerie ou une épicerie en gros ; là où se trouve aujourd’hui installée une brasserie placée sous le signe du sphinx égyptien. 

Pour nous en convaincre, reportons-nous à ces lignes parues dans le « Journal du Lot » daté du 25 avril 1934 : 

« Au cours du mois de février dernier, des maçons travaillant à la réparation d’un immeuble situé place basse, mirent au jour une enseigne toute modeste : «Mlles Cham­pollion, Libraires ».

« L’enseigne, par elle-même, n’avait aucun caractère artistiqueo: petites lettres noires peintes sur la pierre nue. 

« Cette pierre n’en constituait pas moins un document. Elle a été recueillie à l’Oustal de lo mounedo, devenu le musée lapidaire de la cité et le refuge des épaves de notre histoire locale… »

Il est un dernier achat immobilier à mettre à l’actif de Jacques Champollion, dans le cadre de son implantation et de sa vie figeacoises, celui d’une terre plantée de vignes, ayant longtemps appartenu aux frères cordeliers, lors d’une vente de biens nationaux orga­nisée à Figeac en 1791, au cœur même de la période révo­­lu­­tion­naire.

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© Guy Chassagnard 2023